Pudeur

Publié le 9 Septembre 2019

J'ai trouvé de vieilles revues des années 60, dans une d'entre-elles, un éditorial m'a interpellée. Je  partage avec vous l'article que je vais recopier en gras.

" Nous avons , heureusement, passé le temps où les femmes qui laissaient voir leur cheville étaient montrées du doigt. Avec une liberté plus grande, nous est aussi venue celle du corps. Des barrières, des contraintes, sont ainsi tombées qui ne renaîtront jamais. Dans les champs même, les femmes qui travaillent à la moisson ne sont plus vêtues de longues robes noires: j'en ai vu bon nombre en chemisettes légères, voire en short, et ce côté sportif, libéré, de la femme mise enfin à son aise pour accomplir sa tâche, a tout mon assentiment.

Pourtant nous voici sur les plages et au bord des rivières et, dans pudibonderie absurde, il faut tout de même dire que l'étalage- j'allais écrire l'étal- de toute cette chair qui, rôtie, ne sera bien souvent pas même comestible, prend les proportions d'une inutile et sotte indécence. Ce "corps féminin qui tant est tendre" comme l'a dit le poète, perd dans cette exhibition sans freins, la plus grande partie de son attrait.

La femme, même sous les seules apparences physiques, ce doit être un peu de mystère et je ne suis pas du tout un de mes amis qui, se promenant devant trop de corps cherchant à se faire dorer quasi intégralement par le soleil, me lançait: " A présent, on est fixé, on sait qui l'on épouse. "

Ainsi, tout, d'un seul coup, nous est révélé! Et ceci l'est à tout le monde!Et le mari - s'il y a mari - n'aura plus rien à découvrir! Finies les charmantes approches, la précieuse montée de l'amour, le don petit à petit consenti d'un doigt, d'une main, d'une joue puis de lèvres qui ne se seront pas entrouvertes pour tout le monde, d'un corps qui se sera réservé pour celui qui sera l'élu et ne se sera pas exhibé devant la foule. Et, comment veut-on que l'amour ne soit autre chose que le désir, si tant est que celui-ci résiste à cette apparente mise en commun, alors quel'amour peut être, doit être, une chose magnifique, un secret entre deux êtres isolés du monde et capables ainsi de vivre seulement l'un pour l'autre ?

Car l'amour n'est pas mort, des livres, des films outranciers, ont beau nous répéter chaque jour qu'il n'existe plus, chaque jour nous apporte une preuve nouvelle de son existence. J'entends le véritable amour, celui auquel tout être aspire à juste titre pour ce besoin de donner et de recevoir qui est en lui, par cette nécessité de croire en quelque chose et en quelqu'un afin de ne plus se sentir tout seul sur la terre.

Alors pourquoi, par tous les moyens, par celui surtout de la facilité, mettre en péril ce que nous avons de plus précieux? Pourquoi paraître offrir à n'importe qui ce qui a une valeur, dévoiler à tous les yeux des secrets qui aussitôt perdent tout à leur prix?

Pudeur? Non: réserve et mesure. Pudeur? Peut-être, en tout cas pas pudibonderie. Pudeur? Certaines paraissent rougir alors qu'elles devraient rougir d'autre  chose c'est-à-dire de ne pas craindre de s'offrir, inconsciemment je le veux bien et sous prétexte de soleil et de santé, à tous les inconnus qui passent.

Je l'ai dit, je suis pour la liberté. Je ne suis même pas contre le nudisme: nager nu dans une eau libre est une sensation admirable. Seulement il faut être libre pour soi seul, dans des lieux écartés, et non surtout de cette demi-nudité qui elle, est indécente par ce qu'elle montre et ce qu'hypocritement, elle cache en le soulignant: par souvent ce qu'elle laisse voir et ferait bien mieux de dissimuler alors qu'elle ose s'exhiber par une totale méconnaissance de sa valeur exacte.

Non, les temps nouveaux, la liberté chèrement acquise, n'autorisent pas la femme digne de ce nom à se montrer ce qu'elle n'est pas et en même temps à faire un mauvais calcul. L'amour n'est pas mort, certes, mais il apparaît parfois un peu malade. Il ne faut rien faire qui puisse contribuer à le mener à sa perte, le tuer en le défigurant, car, perdre l'amour, c'est tout perdre et même ceux qui le nient le savent bien tout au fond d'un coeur qu'ils conservent surtout lorsquils clament  qu'ils ont cessé d'en avoir un."

Voilà, aujourd'hui les femmes trop vêtues à la plage ou dans les piscines sont critiquées, il y a des années en arrière, c'était celles pas assez vêtues qui déroutaient. Ainsi va la vie...

 

 

Rédigé par D

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